mardi 15 janvier 2013

Deux cueillettes hivernales

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Le faux-fruit du rosier rugueux (Rosa Rugosa) et de l'églantier (Rosa Canina), s'appelle le cynorrhodon. En réalité, il s'agit du réceptacle floral, les vrais fruits étant les akènes qui se retrouvent à l'intérieur.
Hélène:
Poursuivons les découvertes hivernales avec deux nouveaux types de cueillette durant une saison où on ne s'y attendrait pas. Certaines vieilles recettes de l'Europe mentionnent la cueillette du fruit du rosier en hiver, le but de cette manoeuvre étant de faire subir au fruit de un à plusieurs gels (dépendant de la recette, certaines jurent qu'un seul gel est suffisant, alors que d'autres ne suggèrent la récolte qu'en janvier ou février). Ces gels auront pour effet de ramollir le fruit et de le rendre ainsi plus facile à préparer, mais soyez avertis que si vous attendez trop longtemps, les fruits perdront leurs couleurs vibrantes de rouge-orange et tourneront au noir les rendant incomestibles.
En janvier 2012, j'aurais bien fait cette récolte, mais avec toute la pluie que nous avions eu en novembre et décembre (et donc aucun gel), les fruits sont devenus noirs et immangeables. Alors que cette année, les gels sont arrivés plus tôt créant des conditions plus propices à cette cueillette. Le 2 janvier 2013, pour faire cette cueillette, je me suis donc engagée dans les 45 cm de neige que nous avions reçus le 27 décembre. Il faut dire que ces petites sphères d'un orange éclatant font un baume pour le coeur dans ce paysage d'un blanc aveuglant. Et avec autant de neige, il y a certains fruits que je ne suis simplement pas arrivée à cueillir, car je n'ai pas pu les rejoindre. Tout de même, considérant que j'ai perdu un plant de rosier le printemps dernier et que j'ai massacré le deuxième (sans compter qu'il est complètement enterré dans la neige), la première tentative de récolte sur mon troisième plant était bien.



C'est mignon comme fruit, mais qu'est-ce qu'on en fait? Cueillis en hiver, les cynorrhodons s'apprêtent bien pour des gelées. Certaines recettes font mariner les fruits pendant une semaine dans un vin blanc ou rouge avant de les faire bouillir et passer à la moulinette, d'autres omettent l'étape de la marinade. J'en déguste à l'instant une superbe tisane d'une saveur inégalée : Un fruit coupé en deux (moins les graines et les poils) dans de l'eau bouillante donne une merveilleuse tisane rosée qui ne goûte pas le parfum, mais dont on reconnaît néanmoins la source. Ce serait probablement superbe en duo avec des graines d'aneth, ou des feuilles de framboisier ou encore une touche (très légère) de menthe verte.

Si vous avez un rosier rugueux (Rosa Rugosa, Apple Rose en anglais), le fruit est tellement gros qu'il peut se manger tel quel, à condition de ne pas manger les graines et poils à l'intérieur, les poils étant urticants. Cette recommandation est valable pour tous les types de rosiers. Simplement ouvrir le fruit en deux et enlever les graines et poils avec une cuillère fait l'affaire. D'ailleurs, il va falloir que quelqu'un m'explique à quoi ça sert, du poil à gratter, à part jouer de vilains tours.

Note de Louise : La teneur en vitamine C des cynorrhodons est très élevée, beaucoup plus que les oranges, entre autres. Certaines sources mentionnent que le rosier rugueux donne des fruits plus gros que l'églantier et que les variétés sauvages ou non hybridées donnent des fruits plus savoureux.

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Les piquets plantés dans la bûche qui porte
encore son plastique, il ne reste qu'à recouvrir de la tente en
plastique transparent.
Voici une bûche à champignons - plus spécifiquement, des pleurotes de Richters. Nous avions déjà parlé de champignons sauvages, mais il s'agit ici de les faire pousser sur un médium contrôlé dans le but d'en retirer plusieurs cueillettes. Si vous voulez agrémenter votre jardinage, je vous conseille d'en faire l'essai, mais il y a quelques trucs à savoir avant de se lancer.
Bûche installée avec la tente par-dessus.

 Premièrement, ce n'est pas une entreprise facile et en toute honnêteté, je ne crois pas que ma première bûche m'a fait économiser comparé au prix des champignons de l'épicerie. Ma deuxième le fera probablement... Car c'est capricieux, des champignons. J'avais commencé en achetant une bûche de Shiitake. Malheureusement, 3 semaines après son "départ", elle était pourrie, moisie et s'égrenait au toucher. J'avais trop arrosé, certainement, et peut-être que des bactéries ayant eu la chance de se développer dans toute cette humidité n'ont pas laissé la chance aux champignons. Richters, dont le service à la clientèle est impeccable et même au-delà, m'ont offert un remplacement de pleurotes.

J'ai eu la main moins lourde pour l'arrosage, mais toujours rien! Trois mois après, début septembre, je me suis dit "tant pis!" et j'ai laissé la bûche sans eau le temps de mon voyage de deux semaines en France. Au retour, quelle ne fût pas ma surprise de découvrir que ma bûche avait "fleuri"! Et elle nous a donné des champignons en quantité jusqu'à la fin décembre (le temps de lui donner un peu de repos).

Quelques trucs de plus : La bûche est dans un plastique dans lequel on fait des entailles en X où l'on souhaite l'apparition des champignons. Mais il y a un autre plastique qu'on met par-dessus comme une tente. Ce plastique est maintenu à distance de la bûche par des bâtonnets que vous piquez ici et là dans la bûche. Et là le casse-tête commence. Il vous faudra trouver l'endroit idéal pour planter des bâtonnets qui sont sensés tenir à l'écart (mais pas trop) une tente en plastique qui cherchera à s'affaisser quand on la vaporisera de l'intérieur, une tente qui soit laissera tomber l'eau sur la table (à moins que vous ayez mis votre bûche dans une plaque à biscuits immense), soit se collera sur votre bûche (ce qui causera de la moisissure). Ou encore, il vous faudra simplement repositionner la tente quand les champignons commenceront à pousser pour ne pas qu'ils la touchent. Tout cela, c'est compliqué. 
La récolte d'octobre incluait des champignons avec les courges d'hiver Burgess,
les tomates vertes et la consoude séchée (en arrière à droite).
Ajoutez à cela que vous devrez grosso-modo arroser le tout deux fois par jour (mais pas trop à chaque fois, hein) en prenant soin de ne pas arroser directement la bûche, seulement l'intérieur de la tente pour maintenir un taux d'humidité idéal et donc, que vous devrez rester présent et vigilant pendant tout ce temps, ce qui veut dire des semaines, des mois, le temps que la récolte soit finie pour de bon! Tout ceci ne rend pas l'entreprise... faite pour tout le monde. Et il ne faut pas oublier le pire. Si votre bûche se met à pourrir ou n'évolue pas comme il le faudrait, ça sent très mauvais! De toute façon, une bûche qui fonctionne normalement sentira le champignon, alors si vous habitez un 1 et demi, encore là, ce n'est peut-être pas l'idéal. J'ai aussi remarqué que je devais tourner ma bûche pour l'exposer à la lumière pour éviter que ce soit toujours les mêmes côtés qui se retrouvent tout le temps dans la pénombre, sinon elle ne semblait faire des champignons que du côté qui recevait la dite lumière.

Champignons séchés sur la bûche par
inadvertance. 15 minutes dans l'eau chaude
et hop! Ils seront utilisables dans un plat,
quoique moins bons que ceux à maturité.
De plus, si vous oubliez d'arroser, vos champignons sécheront sur place. Il est facile de les réhydrater par la suite pour les manger, même s'ils sont petits, alors ce n'est pas trop grave, mais d'arroser à nouveau la tente ne leur donnera rien de plus : iIs sont morts, ils ne recommenceront pas à grossir.

Malgré tout, l'expérience en vaut la peine! C'est une sorte de jardinage absolument fascinant qui peut très bien se dérouler en hiver, alors que nous nous ennuyons de nos plates-bandes. Les champignons sont d'un monde mystérieux et secret et le fait d'apprendre à connaître les facettes étranges de cet organisme méconnu me fait sentir... vivante alors que tout est mort à l'extérieur.

Note de Louise : Les champignons ne sont pas des plantes. En effet, de nos jours, les scientifiques considèrent que les champignons ne sont ni des végétaux, ni des algues, entre autres, parce qu'ils ne peuvent pas produire de chlorophylle ou fabriquer de produits organiques comme le font les plantes grâce à la photosynthèse. Le champignon constitue le fruit temporaire d'un fongus, dont la partie souterraine permanente s'appelle le mycélium. Les fongi (ou fungi) doivent s'alimenter un peu comme le font les animaux, soit en consommant de la matière organique morte, soit en parasitant un être vivant, soit en formant une association avec un être vivant, association bénéfique pour les deux parties (une symbiose, ce type de champignon s'appelle alors mycorhize). Les champignons forment donc un règne à part, le monde fongique. En passant, les lichens font aussi partie du règne fongique (ils vivent en symbiose avec une algue). Donc, un champignon est la fructification (comestible ou non) d'un fongus qu'on dit supérieur, par opposition aux champignons microscopiques qu'on appelle les champignons inférieurs : les moisissures, la rouille, les mycoses, le mildiou et les levures. Appétissant, non? Une chose est certaine : nous commençons à peine à entrevoir à quel point ces organismes ont un rôle essentiel à jouer dans l'écologie d'un milieu. 

Jardin mort peut-être, mais tout à fait féerique! Je vous laisse sur une photo de mon balcon qui a clairement été visité par les fées de Fantasia au début de l'hiver.