mercredi 4 juillet 2012

Maitrank et Abeilles

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L'entrée du jardin, une spirée en fleurs blanches, un rosier églantier et des framboisiers dorés en bas à droite.

L'aspérule odorante se cache sous les framboisiers, 
à l'entrée du jardin. Elle est couverte non seulement
de ses propres fleurs, mais aussi des pétales tombées
de la spirée, comme s'il s'agissait d'un mariage!

Hélène :
Bienvenue dans le jardin! L'entrée de celui-ci était définitivement à son meilleur lorsque j'ai commencé cet article, vers la fin Mai - début Juin, lorsque la spirée croulait sous les petites fleurs blanches. Ce superbe spectacle s'est transformé récemment avec la barbe de bouc qui offre de belles spires ivoire en forme de feux d'artifice et le rosier églantier aux fleurs roses éclatantes.

Le mois de Mai offre un étrange petit rituel, bien connu en Europe et provenant d'Allemagne (quoique le wikipedia français nous informe - contrairement à sa version anglaise - que sa provenance serait la Belgique). Le Maitrank, Maibowle, May wine ou boisson de Mai, servi traditionnellement lors de la fête du jour de Mai, est fait en aromatisant un vin avec de l'aspérule odorante (Galium Odoratum, parfois aussi connue sous Asperula Odorata). D'autres sources indiquent qu'un vin pétillant peut être utilisé, certains mentionnent des tranches d'orange et autres, moi je suis restée dans la simplicité, n'ajoutant que l'aspérule et du sucre au vin, à laisser mariner pendant 1 mois.
La recette (provenant de cet excellent livre) que j'avais sous la main proposait de le faire avec un Riesling ou un Sylvaner (deux types de vin blanc légers printaniers). J'ai donc contacté un bon ami sommelier, Christophe, qui a un blog sur le vin (en anglais) pour lui demander son opinion. Il m'a proposé un sylvaner très alléchant. Et puis, j'ai pris par erreur aussi un Riesling et ceci me met dans l'heureuse position de pouvoir tester la recette avec 2 vins différents.

Le résultat est surprenant. Le goût du vin est de beaucoup atténué et on goûte définitivement la plante elle-même. La recette essayée faisait mention d'ajouter du sucre et de servir bien froid. Heureusement que j'ai bien suivi cette dernière indication, sinon en effet, le breuvage aurait goûté trop sucré à mon goût, se rapprochant définitivement du vin de glace, dont je ne suis pas particulièrement partisane. Mais il faut le dire, c'est une excellente boisson pour les chaleurs d'été, sans nul doute!

Prête à mariner pour un mois.



Finition un mois après! Avec la barbe de bouc en arrière-plan
qui fait comme un feu d'artifice!


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Les Abeilles :

L'amélanchier n'ayant fait aucun fruit malgré ses multiples fleurs, j'ai bien eu peur que l'hiver que nous avons eu, aussi doux eut-il été, ait aussi emporté mes puissantes alliées du jardin - je parle bien sûr de mes abeilles solitaires (megachilidae ou coupeuses de feuilles), quoique le "mes" soit bien déplacé. Je ne leur ai pas fait un nid, je me suis juste retenue, lors d'une période d'inquiétude naïve, de le détruire. Après avoir contacté l'Insectarium de Montréal, qui offre une expertise indispensable pour l'identification de différents insectes, je vous rapporte leurs recherches et mes observations personnelles.

Voici un individu qui sort de son nid pour la 
première fois de l'année. Les nouveaux nids sont
très visibles ; ils ont souvent un petit tas de bran
de scie (sciures de bois) à l'extérieur de l'entrée.
Il semble que les planches de bois de ma plate-bande peuvent accommoder - suite à mes observations personnelles -    une vingtaine de nids d'abeilles par année, si ce n'est plus. Il m'est clair qu'elles font un travail de poids dans mon jardin. Cette année, j'ai eu le plaisir d'assister à leur éveil, le 29 mai dernier. En cette date précieuse, j'ai non seulement assisté à la sortie de nid de certaines d'entre elles, mais elles m'ont permis de prendre photo après photo sans en sembler troublées!


Voici ci-dessous une très belle photo : Une abeille et un syrphe butinent ensemble des fleurs de ciboulette. La réponse de l'Insectarium, en plus de m'affirmer l'identité de ces 2 individus, mentionne également que le syrphe est un excellent pollinisateur et que son apparence d'abeille ou de guêpe lui sert de protection (mimétisme mullérien).
Dans les fleurs de ciboulettes, il y a ici non
seulement une abeille mais aussi un syrphe (Syrphidae), petit
insecte qui ressemble à une abeille, mais ses
mouvements se rapprochent plutôt de ceux d'un colibri!
C'est aussi un incroyable pollinisateur et ses larves sont
des prédateurs farouches des pucerons!
En arrivant sur ce terrain en 2008, j'ai eu bien peur : "Je m'appuie tout le temps sur ce bois pour travailler, j'ai un jeune enfant qui aime jouer dans le jardin et lui, il met tout le ventre sur les planches! Elles vont nous piquer, c'est sûr!" Et bien rien! Nada, nein. Nous n'avons jamais été piqués et bien que nous y allions avec précaution, ces abeilles sont non seulement pacifiques et capables de s'adapter, mais elles ont aussi appris à nous tolérer (et vice-versa, on l'admet), puis à nous accepter, puis... Puis. Et ici, c'est toujours difficile d'exprimer ce qui se passe et malgré que ce sont des abeilles solitaires fournissant des individus différents à chaque année (une abeille vit un peu plus d'un an seulement), on dirait qu'on se connaît, qu'on se reconnaît et qu'on devient rapidement confortable l'un avec l'autre.
Les coupeuses de feuilles font de parfaits cercles
sur les feuilles de mes amélanchiers
et utilisent ces morceaux dans la fabrication de leurs
nids. Malgré l'aspect de la feuille, il ne s'agit pas de
dommages dangereux pour l'arbre.
Si vous remarquez vous aussi ce genre de trous
ronds sur les feuilles de vos plantes, c'est un bon
signe qu'il y a des abeilles coupeuses de feuilles
tout près ! En effet, elles ne peuvent emporter ces
 bouts de feuilles que sur de très courtes distances.
Par exemple, il y a quelques jours, alors que je cueillais des fraises, une est venue me voir de très proche, s'est frottée contre moi, puis est repartie (la vitesse des petites ailes sur la peau m'a donné la chair de poule!). Peut-être voulait-elle simplement m'identifier. L'an passé, lors de ma course folle à la pollinisation au pinceau de mes cucurbitacées (relatée dans cet article), j'en ai coincé une dans une fleur. Je l'ai brassée du pinceau et bien que déboussolée lorsqu'elle en est sortie (et vous pourrez peut-être mettre ça sur le compte de son étourdissement), elle ne m'a pas piquée. 
Il m'arrive souvent de travailler à proximité du nid de mes abeilles. Pendant cette période, j'ai clairement remarqué qu'elles évitent alors d'y entrer ou d'en sortir jusqu'à ce que je sois partie. Nous avons "une entente". Elle n'est pas signée sur papier, mais ça marche. Alors bien que je n'aie pas d'amélanches cette année à déguster (et que la cause apparente semble plutôt être due à un gel nocturne), je respire définitivement mieux sachant que les abeilles vont bien - très bien, même.